Emballage

Bisphénol A: en fait-on trop?

15 novembre 2011 - Fanny Rousselin

L’interdiction probable du BPA dans tous les contenants alimentaires à horizon 2014 soulève deux grandes questions: celle de l’innocuité des substituts et celle du principe de précaution.

«Nous sommes furieux ». Olivier Draullette, délégué général du Syndicat National des Fabricants de Boîtes, emballages et bouchages Métalliques (SNFBM), ne décolère pas depuis l’adoption par l’Assemblée Nationale du projet de loi sur le Bisphénol A le 12 octobre dernier. Et il n’est pas le seul ! Les professionnels de l’emballage et de l’agro-alimentaire peinent à comprendre les mesures radicales qu’impose ce texte, à savoir l’interdiction totale du bisphénol A dans les contenants alimentaires d’ici 2014 et dans les contenants alimentaires à destination des enfants de moins de 3 ans d’ici 2013.

Plus ennuyeux, les scientifiques ne s’en réjouissent pas davantage ! Car le « dossier » du BPA soulève en fait des problèmes plus complexes. Ceux de la question des produits de substitution tout d’abord, qui, de l’avis des spécialistes, pourraient se révéler plus risqués que le bisphénol A. Ceux du principe de précaution ensuite, de ses fondements et de ses limites, d’autant que le sujet ne fait absolument pas consensus sur un plan scientifique.

Zoom sur un sujet polémique

Le bisphénol A, ou BPA, désigne la molécule de 2,2-bis (4-hydroxyphényl) propane. Son usage est interdit depuis le 1er janvier 2011 dans les biberons, car la substance est soupçonnée d’être un perturbateur endocrinien. Concernant le nouveau projet de loi, voté le 12 octobre, c’est la publication d’un rapport de l’Anses (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire alimentation, environnement, travail) quelques jours plus tôt qui a mis le feu aux poudres.

Synthétisant une montagne d’études, ce rapport d’étape – il manque notamment les données d’exposition conclut à des effets avérés chez l’animal (effets sur la reproduction, effets sur la glande mammaire, effets sur le métabolisme, le cerveau et le comportement) et à des effets suspectés chez l’homme (effets sur la reproduction et sur le métabolisme des sucres et des graisses, pathologies cardiovasculaires). Il préconise de réduire l’exposition et pointe certaines périodes de la vie comme étant plus susceptibles d’être à risque : grossesse et périodes pré et postnatales.

1er janvier 2014 : une échéance irréaliste ?

Concrètement, deux types de contenants alimentaires sont concernés par le nouveau texte : bonbonnes d’eau en polycarbonate d’une part, boîtes de conserve et canettes boisson d’autre part. Dans le premier cas, le bisphénol A est présent en tant que monomère du polycarbonate. « Les bouteilles et flacons alimentaires, majoritairement en PET, ne sont pas concernés par la question du BPA, précise d’emblée Benoît Lefebvre, responsable des affaires réglementaires d’Elipso, organisation professionnelle représentative de l’industrie de l’emballage plastique et souple.

En revanche les produits de type « bonbonnes d’eau » réutilisables le sont ». Et de préciser qu’aucun de ses adhérents n’utilise de Bisphénol A. Mais plus compliqué à gérer, le BPA entre surtout dans la composition des résines époxy (ou époxydes) présentes à l’intérieur des boîtes de conserve et des canettes de boisson. « Le bisphénol A contribue à l’élasticité, l’adhérence et l’étanchéité de l’emballage. Il est essentiel pour permettre au matériau de supporter les contraintes telles que l’emboutissage », explique Olivier Draullette, qui considère que l’échéance du 1er janvier 2014 n’est pas réaliste. « Il faut prendre toutes les précautions avant d’adopter un substitut, qui risque en outre d’avoir des conséquences sur la tenue dans le temps du produit final.

Toutes les solutions alternatives doivent être testées produit par produit et process par process ». Un souci partagé. « Il est essentiel de s’assurer de l’innocuité des substituts au BPA », martèle également Bérénice Mazoyer de l’Ania. Paradoxalement, le délai du 1er janvier 2013 sera sans doute plus facile à tenir car le spectre alimentaire des moins de trois ans est beaucoup moins large que celui des adultes. De fait, c’est essentiellement l’intérieur des couvercles de petit pot qui est concerné. « Il est relativement simple de trouver des résines alternatives, type polyester, car la surface est plane », explique Olivier Draullette. Le casse-tête est nettement plus ardu pour l’intérieur des boîtes et canettes. Parmi les pistes explorées : les organosols, les oléoplastiques ou les métalloplastiques.

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