L’importance de prendre en compte les caractéristiques spécifiques de chaque type d’aliment dans l’évaluation des risques microbiens pour la santé publique. C’est ce que met en évidence une récente étude menée par des scientifiques d’Inrae sur le pathogène Escherichia coli O157 :H7. L’objectif de leurs travaux était de mieux connaître, dans le cas d’une faible contamination, les micro-environnements dans certaines matrices, comme la viande hachée ou le fromage, et leur impact sur la population bactérienne. Ces micro-environnements présents dans les aliments solides se distinguent par des populations microbiennes et des caractéristiques physicochimiques différentes, avec des endroits plus ou moins acides.
L’hétérogénéité de l’acidité de l’aliment
L’équipe de recherche s’est intéressée à l’expression d’un gène spécifique d’E. coli O157 :H7 qui lui permet de produire une molécule clé dans sa tolérance aux milieux acides. Ils ont pour cela utilisé des hydrogels qui simulaient la texture de certains aliments afin de mieux comprendre l’adaptation de la bactérie à différents micro-environnements (plus ou moins acides, en présence d’autres bactéries…). Les bactéries se multiplient et forment des micro-colonies à certains endroits de l’hydrogel. De plus, l’expression du gène était plus forte dans les hydrogels acides (pH = 5), notamment à la périphérie des micro-colonies, ainsi qu’en présence d’une autre bactérie, L. lactis, utilisée pour la fermentation de certains fromages. Les bactéries Escherichia coli provenant de ces environnements étaient plus tolérantes lorsqu’elles étaient placées dans un milieu très acide (pH = 2) simulant l’estomac, par comparaison avec des bactéries cultivées dans un milieu liquide ou sur un hydrogel ayant un pH neutre.
La présence d’autres bactéries
Ces résultats, parus dans NPJ Science of Food, appellent à un traitement différencié du risque en fonction de la potentialité de présence de micro-environnements et de la diversité de populations microbiennes dans le produit. Or pour l’heure, la gestion des risques microbiens se base sur des seuils de contamination standardisés, selon les agents pathogènes et les aliments. Ces derniers se définissent notamment par la détection d’un certain nombre de bactéries pathogènes par gramme d’aliments. Par exemple dans la viande hachée et les denrées prêtes à manger (comme le fromage), le guide d’aide à la gestion des alertes d'origine alimentaire (DGAL/MUS/2023-11) définit comme seuil de sécurité pour Escherichia coli son absence dans 25 g de produit.