Gilets jaunes : l'industrie agroalimentaire est mise à mal

3 décembre 2018 - Pierre Christen

Ces trois derniers samedis, le mouvement des Gilets Jaunes a fortement perturbé l'activité de la grande distribution et a semé le désordre dans les flux logistiques. Ce qui a un impact très négatif pour l'industrie agroalimentaire, qui pourrait avoir déjà perdu 13 ,5 milliards d'euros, selon l'estimation de l'Ania.

La face émergée – et violente - des Gilets Jaunes a sévi à Paris ce week-end, semant la désolation dans le centre de la capitale. Pour autant, ce mouvement de contestation s'est d'abord installé en Province et se manifeste principalement par des blocages de lieux stratégiques (dépôts de carburants, ports,…) et de zones commerciales. Une situation qui conduit à ralentir l'activité des magasins et à provoquer le désordre dans les flux logistiques. Ce qui a un impact très négatif pour l'industrie agroalimentaire dont 80 % des produits sont commercialisés en grande distribution.

Le coup est d'autant plus dommageable que la période de Noël représente 20 % du chiffre d'affaires annuel des entreprises. L'Ania (Association nationale des industries alimentaires) a fait ses comptes : les trois semaines de blocage des Gilets Jaunes ont d'ores et déjà abouti à de lourdes pertes qui pourraient s'élever à 13,5 milliards d'euros pour l'ensemble du secteur agroalimentaire. Elles concernent avant tout des PME.

Le témoignage de Thomas Breuzet, président de Péchalou et Baskalia

Les témoignages de dirigeants confirmant l'âpreté de la situation fleurissent ces derniers jours. A l'instar de Thomas Breuzet, président de Péchalou et Baskalia, qui a poussé un coup de gueule remarqué sur les réseaux sociaux. Aujourd'hui, il dresse un constat sans appel : « Nous nous habituons à constater chaque jour des retards dans les livraisons de nos yaourts aux plate-formes, nous nous habituons à passer notre temps et notre énergie à nous demander si nous pouvons expédier vers telle ou telle destination, nous nous habituons à guetter les infos venant de nos transporteurs, nous nous habituons à solliciter l'indulgence de nos clients sur le non-respect des dates de livraison, le non-respect des contrats dates ». Lui aussi a fait son bilan. Ces deux dernières semaines, les deux laiteries artisanales qu'il dirige ont perdu 15 % de chiffre d'affaires par rapport à la période précédente. « Je sais que la plupart des PME se retrouvent dans la même situation que nous, certaines sont déjà en danger », indique-t-il.

Une situation compliquée pour les produits frais

« Notre secteur est en péril, certaines entreprises ne sont plus en capacité de produire et de livrer. Les conséquences sur le chiffre d'affaires et l'emploi sont irréversibles », déclare Richard Girardot, président de l'Ania. Sur le plan technique, le porte-parole de l'industrie alimentaire demande à ce que les blocages soient de toute urgence qualifiés de force majeure pour limiter l'impact des pénalités logistiques de la part des distributeurs. L'Ania liste les principales conséquences pour les entreprises : une désorganisation de la production conduisant à du chômage technique pour certains sites et une désorganisation totale des relations avec la grande distribution (commandes annulées, ruptures d'approvisionnement, retards de livraison, pénalités, frais de relivraison…). Avec une situation encore plus compliquée pour les produits frais, limités par leur durée de vie.

La séquence négative se poursuit, malgré un essoufflement des blocages

Selon les données communiquées par Nielsen, ce samedi 1er décembre a vu le chiffre d'affaires des hypers et supermarchés diminuer de 8 %. Ce qui semble témoigner d'un relatif essoufflement des blocages. D'autant que les consommateurs ont désormais adapté leur comportement privilégiant des jours et des circuits différents pour faire leurs courses. Ainsi, le chiffre d'affaires des jours précédents a augmenté : + 6 % le vendredi 30 novembre, et + 2 % le jeudi 29 novembre.

La séquence négative se poursuit, mais à un niveau bien moindre que le samedi 24 novembre, qui a connu une baisse du chiffre d'affaires de 18 % et, surtout, du samedi noir 17 novembre, marqué par une chute de 35 % des ventes.

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