« Nous sommes totalement en désaccord avec le food bashing. L’agroalimentaire est un secteur où l’humain prime, avec des personnes très engagées et impliquées, qui ont la volonté de se remettre en question pour être plus responsable et plus écologique », affirme Cécile Boulaire, dirigeante du cabinet conseil de recrutement Manageria. Une observation qui gagne à être connue… D’où l’idée de cette étude, menée du 16 septembre au 26 octobre par Manageria et le site RegionsJob auprès de 507 actifs du secteur. Celle-ci confirme le fossé entre la vision du secteur portée par les professionnels et celle du grand public. « En grande majorité, les professionnels de l’agroalimentaire aiment leur métier et leur secteur », indique Christelle Thouvenin, rédactrice de l’étude.
Des valeurs fortes
C’est même un véritable plébiscite. 89 % des répondants se disent fiers de travailler dans ce secteur. Ils sont 88 % à déclarer aimer leur métier et le dernier poste qu’ils ont occupé. Leur quotidien est à la hauteur de leurs attentes : 79 % déclarent se réaliser professionnellement et 76 % personnellement. Une valeur se détache dans la représentation que se font les professionnels de leur secteur : celle de l’innovation, citée par 56 % des répondants, devant celle de « nourrir le monde ». En revanche, ils estiment que le secteur n’est pas reconnu à sa juste valeur par le grand public (à hauteur de 63 %) et par les médias (65 %). « Les deux tiers des professionnels de l’agroalimentaire estiment que le secteur n’est pas reconnu à sa juste valeur », souligne Cécile Boulaire.
« On fait ce métier car on a des valeurs fortes, nourrir le monde fait sens, la crise du Covid a montré combien c’est un enjeu essentiel. Cela porte les professionnels de l’agroalimentaire », commente Christelle Thouvenin. L’étude Manageria – RegionsJob démontre que l’on n’arrive pas dans l’agroalimentaire par hasard. Pour plus de la moitié des sondés, c’est le fruit d’un véritable choix. Et pour un quart d’entre eux, c’est même une vocation.
71 % des répondants en poste disent cependant vouloir changer de poste dans l’année à venir. Une contradiction ? « Non, c’est globalement cohérent avec les autres secteurs, nuance Cécile Boulaire. Toutes les études en déclaratif indiquent que les cadres veulent bouger. Mais une fois qu’ils entrent dans nos processus et que cela devient concret, resurgissent les freins à la mobilité ».
Le défi de l’attractivité
C’est l’autre enseignement clef de l’étude menée par Manageria et RegionsJob, le secteur agroalimentaire est confronté à deux difficultés structurelles : la localisation géographique et la rémunération. « Beaucoup d’usines sont implantées dans le monde rural, une localisation plus ou moins valorisée par les cadres. Ce qui explique le fort déficit du taux d’encadrement dans les usines », commente Cécile Boulaire. L’autre frein est celui de la rémunération. L’étude le fait bien ressortir. Pour plus d'une personne sur deux (64 %), c’est une meilleure rémunération qui motive son souhait de mobilité.
« Les cadres en PME et ETI sont davantage prêts à changer d’entreprise que les cadres dans les grands groupes où il y a plus de possibilités d’évolution et de formations pour travailler son employabilité », précise Christelle Thouvenin. La rédactrice de l’étude souligne l’étendue des actions à mettre en place pour attirer et fidéliser le capital humain. « Notre constat en tant que cabinet de recrutement, c’est qu’il y a une vraie pénurie de profils, confirme Cécile Boulaire. Notre valeur ajoutée est justement de connaître suffisamment les métiers pour trouver des candidats hors agro afin de pallier cette pénurie. Pour attirer et retenir leurs talents, notamment les jeunes générations, les industriels de l’agroalimentaire ont tout intérêt à travailler leur mission d’entreprise à 360° en valorisant leurs engagements sociétaux et environnementaux ». Une des clefs de l’attractivité réside dans le lien aux territoires. « Bien au-delà d’une simple marque employeur, il s’agit pour les entreprises de faire ressortir le sens profond de leur raison d’être pour mieux valoriser leurs produits et attirer et conserver des talents en quête de sens, de reconnaissance et d’une meilleure rémunération », conclut-elle.