La LME fait souffler le vent de la concurrence
Mesure phare de Nicolas Sarkozy et du gouvernement Fillon pour contrer l’augmentation des prix alimentaires et doper la croissance, la Loi de Modernisation de l’Économie a été examinée pendant près de quinze jours par les parlementaire de l’Assemblée nationale. Sur les quelques 1500 amendements qui avaient été déposés, plusieurs d’entres eux ont été adoptés face à l’inquiétude des fournisseurs agriculteurs et industriels. Processalimentaire.com fait le point sur les principales évolutions du texte qui doit à présent passer devant le Sénat avant son adoption mi-juillet.
1/ Négociabilité des prix : éviter les déséquilibres flagrants
L’action commune du 27 mai dernier menée par l’ANIA et de la FNSEA sous forme de pétition a été entendue par le gouvernement. Les députés ont inscrit dans la LME un amendement octroyant des contreparties écrites à la libre négociabilité des tarifs. « Nous posons le principe de la négociabilité des tarifs, qui existe partout sauf dans les relations avec la grande distribution. Bien sûr, cela ne veut pas dire qu’on laisse le renard entrer dans le poulailler : négocier, ce n’est pas étrangler ; c’est s’engager de manière réciproque, précise le député Jean-Paul Charié, rapporteur de la LME. C’est pourquoi nous parlons d’« interdiction des déséquilibres significatifs » et (…) d’« obligation réciproque » dans le contrat préalable unique. ». Concrètement, les obligations et échanges de services seront écrits dans une convention entre les deux parties et dont le gouvernement estime pouvoir assurer le contrôle via les services de la DGCCRF.
2/ Implantation plus libre des supermarchés
Autre inquiétude cette fois-ci relayée par les élus locaux : la suppression de la limite de 300 m2 pour l’implantation des supermarchés sans autorisation préalable. Dans la nouvelle loi, cette superficie a été relevée à 1000 m2 ce qui laisse le champs libre aux hard discounters champions des bas prix. Un amendement adopté au parlement inscrit le droit de « préemption renforcé » des communes entre ces deux seuils. Il permet aux communes la prise en charge d’une part des intérêts d’emprunts contractés par le FISAC (Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce) en cas de préemption. Les députés de l’opposition ont sur ce point indiqué que les financements n’étaient pas garantis pour le moment.
3/ Autorité de la concurrence aux pouvoirs élargis
Déjà prévue dans la version initiale de la LME présentée aux parlementaires, l’Autorité de la concurrence étend le champ de ses compétences pour contrôler l’application des textes régissant la concurrence. Un amendement déposé par les députés UMP permet lui permet ainsi de prononcer des injonctions structurelles à l’intention des distributeurs jugés en situation d’abus de position dominante. Le gouvernement a aussi maintenu l’autosaisine du ministère public, l’appel aux commissaires aux comptes et a indiqué sa volonté de spécialiser les tribunaux et d’augmenter les amendes en cas de distorsion de concurrence.
4/ Actions de groupe remis à plus tard
Le gouvernement a-t-il eu peur de créer un nouveau lobby de consommateurs ? Déjà pratiquées en Amérique et au Royaume-Uni, les actions de groupes ou « class actions » étaient inscrites dans le rapport Attali remis au président Sarkozy en janvier dernier. Absente de la version initiale de la LME, la notion était réapparue pendant quelques jours avec un amendement déposé par son rapporteur, Jean-Paul Charié lui-même. Sous pression gouvernementale et du patronat, l’article a finalement été retiré du vote au dernier moment, provoquant l’indignation de l’UFC-Que Choisir et de la CLCV (Consommation, logement et cadre de vie). Luc Chatel a quant a lui promis la création d’un groupe de travail et le dépôt d’un projet de loi avant la fin de l’année permettant de mieux encadrer les actions de groupes en évitant leurs effets pervers.
Nos enquêtes :
- « La loi Chatel remet la négociation au premier plan ». Magazine Process alimentaire – Décembre 2007, p. 8,
- « Flambée des matières premières : quelles stratégies ? ». Magazine Process alimentaire – Janvier 2008, p. 8.
Mobilisés conte la LME
Retrouvez notre article Événement « Mobilisés conte la LME » dans le numéro de Process alimentaire de juin 2008. Il revient sur un mois de tractations de la part des fournisseurs et des distributeurs alimentaires.