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Quels effets aurait une hausse des prix agricoles français de 10 % ?

25 juin 2018 - Karine Ermenier

Si les prix agricoles domestiques augmentaient de 10 %, cela entraînerait mécaniquement une hausse de 4,4 % de la dépense d’achat en produits alimentaires domestiques (hors restauration) selon l’Observatoire. Et, par conséquent, une hausse des dépenses des ménages (toutes catégories de produits et services confondus) de "seulement" 0,5 % à taux de taxes et de marges constants tout au long de la filière. Crédit photo : Pascal Xicluna / Min.Agri.Fr

Sur ses 320 pages de rapport remis au Parlement le 19 juin dernier, l’Observatoire de la formation des prix et des marges alimentaires a consacré 319 pages à l’analyse de la situation passée en 2016 et 2017. Une seule page se risque à la prospective mais elle est digne d’intérêt. Car, sur demande du comité de pilotage de l'Observatoire, elle simule l’effet d’une augmentation de 10 % des prix agricoles domestiques sur les dépenses alimentaires des foyers. A l’heure où la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire prévoit de redonner aux agriculteurs le pouvoir de fixer leurs prix de vente, cette projection apporte des informations objectives au débat. Même si l’Observatoire tient à souligner que ce chiffre de 10 % a été choisi de façon arbitraire.

Hausse de + 0,5 % de la dépense totale des ménages

Donc, si les prix agricoles domestiques augmentaient de 10 %, cela entraînerait mécaniquement une hausse de 4,4 % de la dépense d’achat en produits alimentaires domestiques (hors restauration). Les prix des produits des industries agroalimentaires et des boissons s'en trouveraient relevés de 3,6 %. « De quoi aboutir à 2,7 % de hausse de la dépense alimentaire totale (restauration et aliments importés inclus), et + 0,5 % sur la dépense totale des ménages, compte-tenu que l’alimentation pèse 20 % des dépenses des ménages », indique l’Observatoire. Cette projection ne prend pas en compte l’effet de la hausse de prix sur le volume de la demande, mais seulement les transmissions mécaniques de cette hausse tout au long de la chaîne. «Pour y parvenir, nous simulons la hausse des prix de produits de chaque branche qui permet de maintenir sa valeur ajoutée au niveau initial. Et nous considérons, par ailleurs, que les taux de taxes et de marges de commerce et de transport restent constants », commentent les rédacteurs. Autre simulation possible : si les niveaux de taxes et de marges restaient constants, et non plus les taux, alors l’effet sur les prix s’en trouverait encore amorti : il avoisinerait les + 2 %, versus + 2,7 % dans le scénario précédent avec une progression de + 0,4 % de la dépense totale des ménages.

Incidence de l'augmentation de 10 % des prix des produits agricoles domestiques

 Augmentation de la dépense finale de consommation alimentaire en produits domestiques et importés
Produits agricoles domestiques+ 9,9 %
Produits de la pêche et de l’aquaculture+ 0,1 %
Incidences sur les produits des industries alimentaires et boissons+ 3,2 %
Incidence sur les prix à la consommation alimentaire hors restauration+ 3,8 %
Incidence sur les prix en restauration+ 0,6 %
Incidence sur les prix à la consommation alimentaire avec restauration+ 2,7 %
Effet sur les dépenses totales des ménages+ 0,5 %

Source : Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.

 

Alors même que le relèvement du seuil de revente à perte de 10 % fait déjà craindre une hausse des prix et crier au loup les associations de consommateurs ainsi que l’enseigne Leclerc, bille en tête, une telle inflation ferait nécessairement débat. D'autant qu'elle s'accompagnerait mécaniquement d'une hausse d'au moins 3 % des tarifs des industriels de l'agroalimentaire, sans autre effet par ailleurs.

Ce scénario imaginé par l'Observatoire reste évidemment totalement hypothétique, mais il a au moins le mérite de projeter l'ensemble des acteurs et observateurs du marché alimentaire dans un scénario d'amélioration des conditions de vie des producteurs et agriculteurs français en amont. A voir le succès de la marque du consommateur C’est qui le Patron, certains consommateurs ont d'ores et déjà l'air d'être prêts à en accepter les conséquences financières. Si on leur garantit, évidemment, que toute la filière en tire profit. Car l’Observatoire a tout de même fait le constat qu’en 2017, les prix à la production agricole avaient augmenté, certes, de 3 % en moyenne. Mais insuffisamment pour couvrir l’ensemble des coûts de production des agriculteurs dans toutes les filières, même en comptant les aides françaises et européennes. Surtout, cela ne s’est que peu répercuté sur les prix à la consommation, qui ont augmenté de 1 % seulement en un an.

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