Fipronil : « Les entreprises ont immédiatement réagi »

7 septembre 2017 - Pierre Christen

Catherine Chapalain, directrice générale de l'Ania (Association Nationale des Industries Alimentaires)

La crise médiatique provoquée par les contaminations au fipronil a suscité des interrogations. Éléments de réponse avec Catherine Chapalain, directrice générale de l’Ania (Association Nationale des Industries Alimentaires).

Version intégrale de l’interview publiée dans le numéro de septembre 2017 de Process Alimentaire.

Suite à la crise au fipronil, les informations concernant les produits transformés ont été délivrées au compte-gouttes, ce qui a étalé la crise médiatique. Pourquoi ?

Avant tout, il est très important de rappeler que les producteurs d’œufs, d’ovoproduits et nos entreprises agroalimentaires sont victimes d’une fraude qui est intervenue très en amont puisqu’il s’agit d’un fournisseur d’insecticide qui a falsifié un produit destiné à traiter les poulaillers en y ajoutant un produit non autorisé pour l’alimentation humaine. En temps voulu, il faudra faire toute la lumière sur cette fraude et l’enquête judiciaire en cours permettra de déterminer les responsabilités.

Malgré cela, la sécurité des consommateurs est et sera toujours la préoccupation première des entreprises agroalimentaires.

Il est nécessaire d’expliquer les étapes et le travail collectif et rigoureux effectué par la filière et par les autorités publiques, qui se poursuit au quotidien pour identifier les produits touchés et endiguer cette fraude durablement.

Dès l’alerte donnée le 5 août par les autorités publiques françaises, les entreprises ont pris leurs responsabilités en vérifiant auprès de leurs fournisseurs d’œufs et d’ovoproduits la traçabilité des lots et en bloquant par précaution, après l’identification, les produits concernés. Ce travail sur les ingrédients en amont était nécessaire pour permettre aux industriels de disposer d’éléments pour cibler les produits susceptibles d’être contaminés.

Dans ce cadre, l’étroite collaboration entre les entreprises et les pouvoirs publics est primordiale car ce sont elles qui donnent les instructions et les mesures de gestion pour tous les acteurs de la filière.

Les instructions des pouvoirs publics et de l’ANSES, qui a conclu à un risque sanitaire très faible et fixé une limite maximale en résidus, ont permis aux entreprises de prendre les mesures nécessaires (maintien en rayon /retrait/rappel).



Quid de la détection du fipronil ?

Concernant la détection du Fipronil, il est important de comprendre que cette substance est interdite. Elle ne fait donc pas partie des contrôles standards prévus dans le cadre des plans de maîtrise des entreprises. Par ailleurs, le temps d’analyse en laboratoire et d’interprétation des résultats ne doit pas être négligé.

A ce jour (le 24/08/17), les analyses se poursuivent et dans le cas où le fipronil est quantifié dans un produit au-delà de la LMR (limite maximale en résidus), les fabricants suivent les procédures prévues par les pouvoirs publics dont le retrait des produits de la vente et la destruction des lots contaminés.

Nous sommes ici face à une fraude qui ne doit pas faire oublier que le système de traçabilité et de sécurité sanitaire français est l’un des plus fiables au monde avec, par exemple, 200 fois moins d’intoxications alimentaires qu’aux Etats-Unis.



Pourquoi les retraits de MDD ont-ils été diffusés avant les marques nationales ?

Je tiens à rappeler qu’il y a deux types de contrôles : les contrôles officiels de la direction générale de l'alimentation (DGAL) et les auto-contrôles effectués par nos entreprises. Concernant ces auto-contrôles, comme le prévoit les dispositions réglementaires, les entreprises agroalimentaires font remonter à leurs directions départementales de la protection des populations (DDPP) et non à leur fédération ou à l’ANIA, toutes les informations issues de leurs auto-contrôles, notamment les résultats d’analyses montrant des éventuels dépassements de la LMR du fipronil dans leurs produits. Les DDPP disposent des données issues des contrôles officiels qu’elles commanditent. Cette démarche permet d’avoir une vision globale de ce qui se passe sur le marché. Bien entendu, depuis le début de l’alerte, l’ANIA, ses fédérations et ses entreprises adhérentes, travaillent aux côtés des autorités pour contribuer à la remontée des données.

Agacé par la « lenteur » de certains de ses fournisseurs, Michel Edouard Leclerc demande une remise à plat des procédures de crise. Est-ce pertinent ?

Les procédures en cas de fraude sont très strictes et rigoureuses. Les entreprises ont immédiatement vérifié auprès de leurs fournisseurs d’oeufs et d’ovoproduits la traçabilité des lots et les ont bloqué par précaution. Elles ont ensuite effectué les analyses nécessaires afin d’identifier ou non la présence de fipronil au-dessus de la LMR. Les entreprises ont pour obligation de prévenir à la fois les DDPP mais aussi leurs clients notamment de la grande distribution. Les entreprises sont pleinement conscientes de l’enjeu en termes de sécurité et de confiance des consommateurs. Un bilan devra être fait et des leçons seront bien évidemment à tirer de cette fraude. Aujourd’hui nous sommes encore quotidiennement dans l’action pour enrayer collectivement cette fraude qui fragilise l’ensemble de la filière alimentaire française.



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