L’alimentaire est le quatrième secteur ayant enregistré en 2017, dans le dispositif R-nano, le plus grand nombre de substances à l'état nanoparticulaire (soit 2 à 4 % des déclarations totales rapportées). C’est ce que révèle le dernier avis, publié le 9 juin dernier, par l’Agence nationale de sécurité sanitaire des aliments (Anses), qui fait l’état des lieux sur la présence des nanomatériaux (particules entre 1 et 100 nm) manufacturés dans les aliments.
D’après la base de données de l'Observatoire de la qualité de l’alimentation (Oqali) et la base de données relative aux nouveaux produits (GNPD), près de 900 produits alimentaires (soit 2,5 % des références répertoriées) intègrent au moins un additif ou un ingrédient pour lesquels « la présence de nanomatériaux manufacturés est avérée ». Ainsi, selon les experts du groupe de travail « nano et alimentation » (GT Nano), en considérant la proportion de produits contenant au moins l’une des substances, les cinq catégories alimentaires les plus concernées sont :
- le lait infantile (25,6 %) ;
- les confiseries (15,6 %) ;
- les céréales du petit-déjeuner (14,8 %) ;
- les barres céréalières (12,9 %) ;
- les viennoiseries et desserts surgelés (10,9 %).
A l’échelle du nombre de produits contenant au moins l’une des substances, la répartition est la suivante :
- confiseries (134 produits) ;
- glaces et sorbets (89 produits) ;
- céréales du petit-déjeuner (66 produits);
- aliments infantiles de diversification (63 produits);
- bouillons et potages (58 produits).
Toujours selon ce rapport, les sept nanomatériaux les plus couramment retrouvés sont les colorants (carbonate de calcium-E 170, dioxyde de titane-E 171 et les oxydes de fer-E 172), ainsi que les additifs (phosphate tricalcique-E 341iii, silice amorphe synthétique-E 551 et silicate de calcium-E 552), qui sont utilisés en tant que fluidifiants dans les poudres anhydres. Dans le détail, les colorants E 170 et E 171 représentent les deux tiers des occurrences. Tandis que le E 172, le E 551 et le E 341iii représentent le dernier tiers. Le silicate de calcium-E 552 n’a quant à lui pas été retrouvé dans les produits alimentaires répertoriés sur Oqali. Par ailleurs, les experts ont identifié 30 substances pour lesquelles la présence de nanomatériaux est suspectée et non confirmée.
L’Anses souligne que cette étude a été effectuée avant l’interdiction de l’utilisation du dioxyde de titane.
Une prochaine étude aura pour objectif d’étudier les risques sanitaires que pourraient représenter ces substances pour les consommateurs. En attendant, l’Anses renouvelle ses recommandations. Il s'agit en particulier de limiter l’exposition des consommateurs en évitant les usages superflus de nanomatériaux dans l’alimentation et en favorisant les produits sûrs, dépourvus de nanomatériaux, et équivalents en termes de fonction et d’efficacité. Le GT Nano souligne aussi la nécessité d’établir une définition des nanomatériaux manufacturés harmonisée au niveau européen. Pour rappel, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a publié en 2018 un guide scientifique et technique proposant une approche harmonisée d’évaluation du risque adaptée aux nanomatériaux. Il contient un logigramme aidant à l’évaluation du risque.
Le sujet des nanomatériaux n'est pas une problématique nouvelle. Dans le cas du dioxyde de titane par exemple, suite à la publication de l’avis de l’Anses en avril 2019, le gouvernement s’est finalement prononcé pour l’interdiction du dioxyde de titane dès le 1er janvier 2020. Plusieurs fabricants du domaine de la confiserie et plusieurs enseignes se sont engagés depuis plusieurs années à retirer le dioxyde de titane de leurs recettes. Illustration avec Mars Wrigley Confectionery France qui a investi pas moins de 70 millions d'euros pour retirer le dioxyde de titane de ses célèbres billes chocolatées M&Ms (lire Février 2020, p.26).