Après plusieurs années de débats, l’Efsa a finalement revu sa position sur le dioxyde de titane, colorant blanc et opacifiant utilisé en alimentaire sous le code E171. Il n’est plus considéré comme sûr pour la santé et pourrait bientôt être interdit dans toute l’Union européenne.
En 2016, l’Agence européenne avait conclu que cet additif sous forme de nanomatériaux ne posait pas de problème de sécurité au vu des données disponibles, mais que des études complémentaires seraient nécessaires sur la repro-toxicité. Cet avis avait été remis en cause dès 2017 par l’Inrae. L’institut de recherche avait prouvé que le E171 pénétrait la paroi intestinale chez l’animal et induisait des lésions. En 2020, les chercheurs français avaient aussi mis en avant que les nanoparticules du dioxyde de titane pouvaient traverser le placenta et atteindre les fœtus chez l’humain.
Ces résultats avaient poussé de nombreux fabricants à revoir leurs formules afin de supprimer le colorant de leurs listes d’ingrédients. Avec l'arrêté du 17 avril 2019, les autorités françaises ont suspendu la commercialisation du E171 par principe de précaution. Suspension qui a été prolongée d’un an par l'arrêté du 21 décembre 2020. La France est jusqu’à présent le seul pays à l'avoir fait dans l’Union européenne, mais la nouvelle évaluation de l’Efsa pourrait changer la donne.
Ré-évaluation des données depuis 2016
L'Agence européenne avait reçu en 2019 une déclaration de risque de l’Anses (France) mais avait conclu que les éléments n’invalidaient pas son précédent avis sur le dioxyde de titane. Toujours en 2019, elle avait été alertée par la NVWA (Pays-Bas) sur la nécessité de mener des études immuno-toxicologiques en plus des effets repro-toxiques. Dans ce nouvel avis, l’Agence a étudié les données scientifiques sur le colorant et les nanomatériaux parues après 2016. « En tenant compte de toutes les études et données scientifiques disponibles, le groupe a conclu que le dioxyde de titane ne peut plus être considéré comme un additif alimentaire sûr. Un élément critique pour arriver à cette conclusion est que nous n'avons pas pu exclure les problèmes de génotoxicité qui pourraient survenir suite à la consommation de particules de dioxyde de titane. Après une ingestion orale, l'absorption des particules de dioxyde de titane est faible, mais elles sont susceptibles de s'accumuler dans l'organisme », explique Maged Younes, président du groupe scientifique de l’Efsa sur les additifs alimentaires et les arômes (groupe FAF).
Les experts ne se prononcent pas sur les autres usages du dioxyde de titane, qui est toujours employé dans les cosmétiques, peintures, médicaments, dentifrices…
Si l’Efsa n’a qu’une fonction consultative, cet avis va servir de base à la Commission européenne qui statuera sur son interdiction dans le domaine alimentaire dans les prochains mois. Dans le cas probable où elle suivrait les résultats de l’évaluation, l’utilisation et la commercialisation du dioxyde de titane seraient bannies de l’Union européenne, obligeant les fabricants à reformuler leurs produits. S’ils ne l’avaient pas déjà fait par précaution, à l’instar des entreprises françaises.