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Le changement de paradigme de la PAC

20 septembre 2011 - Compte rendu de François Morel

Mathieu Luthier, représentant le Ministère de l'Agriculture, de l'alimentation de la Pêche , de la Ruralité et de l'aménagement du Territoire et Jean-Christophe Debar, consultant AgriUS lors de la table ronde organisée par l’Institut LaSalle à Beauvais.

Le discours de Rennes (13 septembre 2011) de Bruno Le Maire Ministre de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche, de la Ruralité et de l’Aménagement du territoire est appelé à rester dans les mémoires. Car, prononcé lors de l’inauguration du 25ème Space, il a été spécialement long.
Le ministre s'est donné l’occasion avec cet évènement de jeter les bases de l’agriculture de demain ; il a livré autrement dit toutes les pistes destinées à moderniser l’agriculture française. Le cap qu'entend poursuivre le gouvernement tient en quatre mots : compétitivité – qualité – simplification des règles (assez d’applications administratives, techniciennes , sourcilleuses… ! ) – exportation.

« Il faut sauver le budget de la PAC. »
Telles sont les conditions pour que la France agricole réussisse, a déclaré le Ministre, mais en sachant, a t-il rappelé, que cela passe par la défense de l’agriculture française en Europe. La position du gouvernement est claire : « Il faut sauver le budget de la PAC. L‘enjeu n’est rien moins que de maintenir - à l’euro près- le budget de la politique agricole commune après 2013».
Bruno Le Maire estime en effet que le rôle de l’Union Européenne est de défendre chaque producteur, et que la régulation des marchés permette la défense de chaque producteur en situation de crise ( sanitaire, climatique ou économique). Le ministre a insisté sur le fait que « les paysans français, les éleveurs bovins et les éleveurs porcins français n’ont pas à être sacrifiés sur l’autel du libéralisme et du libre –échange. »

Les enjeux géopolitiques et géo-économiques de l’agriculture et de l’alimentation
On peut rapprocher cette vision du ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, de celle des experts qui sont intervenus le 7 septembre à l’Institut LaSalle à Beauvais, parmi lesquels François Guillaume ancien président de la FNSEA, à un colloque qui avait pour thème : « les enjeux géopolitiques et géo-économiques de l’agriculture et de l’alimentation ».
François Guillaume a parfaitement mis en exergue les principaux enjeux touchant, en un mot, à la sécurité alimentaire :

  • Géopolitiques : qui expliquent en grande partie, selon lui, le « printemps arabe »
  • Economiques
  • Démographiques : 1,5 milliards d’hommes en Inde en 2050, 1,5 milliards également en Chine, 1,8 milliards en Afrique (doublement de la population actuelle).
  • Fonciers : croissance des villes L
  • Idéologiques marqués par l’entrée dans l’ère du libéralisme : place de l’OMC, approche à géométrie variable de certains pays (Australie, Nouvelle Zélande), installation de la PAC, faiblesse des pays en voie de développement
  • Politiques.

Avec un tournant : le Sommet international de Rome (1996) où tous les chefs d’Etat ont déclaré que seul la voie du libéralisme pouvait sauver la production agricole et résoudre, par ce biais, les problèmes de sous-développement et de la faim. François Guillaume a résumé les propositions du plan baptisé de son nom, à l’époque où il était ministre :

  • La création de l’équivalent d’une OPEP des pays agricoles
  • La création de marchés communs agricoles
  • La mise en place de plans Marshall pour aider au décollement des pays en voie de développement, sous réserve de ne libérer les fonds qu’une fois les actions accomplies.
  • La création de zones monétaires fiables.

Jean-Christophe Debar consultant AgriUS-analyse, président de la fondation FARM, a, de son côté, souligné le changement de paradigme.
Depuis les années 2000, la sécurité alimentaire constitue en effet la nouvelle donne, ainsi que la réduction de la pression sur l’environnement. Un sujet en plein dans l’actualité, comme en témoigne la conférence de l’OCDE –FAO qui s’est tenue début septembre à Paris ; elle est destinée à organiser ce nouveau paradigme qui se résume à la « croissance verte ». « C’est une manière de mettre en actes le développement durable. »

Si on résume, la politique agricole européenne aura connu plusieurs évolutions majeures :

  • La PAC (années 1960 ) basé sur un système d’intervention garantissant aux producteurs des prix élevés et stables ;
  • Les négociations du GATT, suivi de l’OMC (années 1980) en vue de supprimer ces politiques d’intervention (baisse des prix) compensées par des aides directes aux producteurs, qui ont été découplées, à savoir indépendantes des volumes de production.
  • Les accords de Marrakech (1994) qui ont tourné autour de la politique alimentaire (commencement des préoccupations sanitaires), de la politique environnementale (sensibilisation plus grande aux conséquences des gaz à effet de serre), et des modèles de système de production.

Maintenant, on s’inquiète de la démographie en 2050 : entre 2 et 3 milliards d’hommes en plus sur terre.
« Il faudra bien augmenter la production », analyse J-C Debar. Qui a précisé qu’entre 1950 et 2000, on a assisté à une véritable chute des prix (déduction de l’inflation). Ainsi, pour certains produits (grandes cultures) ils ont été divisés par 3 !

Depuis le milieu des années 2000, on constate une fluctuation des marchés agricoles et une forte volatilité des prix, beaucoup plus forte que lors des années précédentes. Le problème est maintenant de protéger les agriculteurs contre ce phénomène. « Confronté à un minimum de certitude, explique J-C Debar, un agriculteur va investir au minimum ».

Il y voit un véritable motif d’intervention publique, si nous voulons un environnement propre, la conservation des paysages… Les experts sont pour le maintien de la PAC : il faut garder les prix d’intervention mais à un bas niveau ; par contre il faut s’attendre à un verdissement de la PAC par un renforcement de la conditionnalité des aides du 1er pilier. C’est sur quoi s’oriente déjà le projet de PAC 2013.

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