Novel Food. Un nouveau texte avant fin 2011
Après trois ans de négociations, la révision du règlement "Novel Food" a finalement échoué le 29 mars dernier lors d’une ultime conciliation entre le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen. Les discussions ont achoppé sur la question des produits alimentaires issus du clonage animal. Mais cet échec va aussi avoir un impact sur l’innovation agroalimentaire au niveau européen. Car d’autres dispositions - qui faisaient consensus - comme la simplification de la procédure d’autorisation des aliments et ingrédients nouveaux ou encore la définition d'un cadre pour les nanomatériaux, ne pourront entrer en vigueur.
Désaccord sur le clonage
C’est la question du clonage qui a bloqué l’ultime procédure de conciliation. Partisans d'une interdiction totale des aliments issus d'animaux clonés et de leurs progénitures, les eurodéputés avaient finalement proposé de limiter leurs exigences à l'étiquetage des aliments concernés. « Nous avons fait un énorme effort pour obtenir un compromis, mais nous ne voulions pas trahir les consommateurs dans leur droit de connaître si les aliments proviennent d’élevages utilisant des clones », précise la députée Kartika Liotard, rapporteur du dossier Novel Food.
"C'est une honte, a réagi Monique Goyens, directrice générale du Beuc, représentant les consommateurs européens. Les européens sont très clairs : ils ne veulent pas que le clonage soit utilisé à des fins alimentaires et désormais, clairement, ils n'ont pas été entendus".Selon une étude commanditée par la Commission européenne et publiée en 2008, une majorité de consommateurs européens a déclaré ne pas être prêt à acheter des aliments issus d'animaux clonés, même si une instance officielle garantit leur innocuité. Huit sur dix ont, de surcroît, déclaré qu’un étiquetage spécifique était nécessaire.
Le Conseil de l'Union européenne a, de son côté, privilégié la faisabilité des mesures et déploré le caractère irréaliste de la proposition d'un étiquetage global des aliments issus d'animaux clonés ainsi que de leurs progénitures. « Cette soi-disant solution trompeuse et inapplicable (…) aurait exigé, dans la pratique, de retracer la généalogie de chaque tranche de fromage ou de salami ! », a critiqué la présidence hongroise du Conseil de l’UE. Celui-ci accuse également les parlementaires d’avoir refusé un paquet de huit mesures incluant l’interdiction immédiate du clonage et des aliments produits à partir d’animaux clonés, des mesures temporaires jusqu’à “l'adoption par le Conseil et le Parlement européen d'une législation complète sur le clonage”. Le Conseil avait proposé un étiquetage sous six mois des viandes bovines issues de progénitures, mais, concernant les autres aliments, avait opté pour une étude préalable de faisabilité. De son côté, le commissaire européen à la santé et la sécurité des consommateurs John Dalli, médiateur dans les discussions, a indiqué son regret de voir échouer cette proposition de règlement qui est sur la table depuis 2008.
Statut-quo sur les autres sujets
Il faut savoir que règlement européen n°258/97 « Novel Food » fixe un cadre global au processus d’autorisation pour l’ensemble des nouveaux aliments et des ingrédients issus de nouvelles technologies. L’échec de la révision annule donc de facto d’autres évolutions très attendues par les professionnels qui jugent le cadre réglementaire actuel trop rigide, long et inadapté. La procédure complète d’autorisation devait ainsi être simplifiée avec la suppression de la première évaluation par un État-membre au profit d’une centralisation par l’Efsa. Ces modifications ramenaient la durée d’instruction de chaque dossier de 30 mois actuellement à 12 mois environ. La procédure d’équivalence substantielle, qui se faisait au détriment du premier déposant, devait aussi disparaître. Le texte prévoyait aussi une meilleure prise en compte des produits traditionnels issus de pays tiers. “Cette révision de la législation Novel Food aurait permis de stimuler l’innovation agroalimentaire en simplifiant le cadre réglementaire actuel et en facilitant la mise sur le marché d’aliments nouveaux”, précise la Confédération des industries agroalimentaires européennes (CIAA) qui regrette l’impossibilité de trouver un accord sur la révision du règlement. Le texte prévoyait également de donner un cadre aux nano-particules.
Face à cette urgence, le Commissaire européen John Dalli a annoncé cet après-midi à Bruxelles devant les eurodéputés son intention de soumettre une nouvelle proposition pour le règlement Novel Food avant la fin de l'année, ainsi que de démarrer un processus législatif distinct sur le clonage aussitôt que possible.