Le sauvetage de la filière volaille export
Déclarations à la presse d’un rapprochement souhaité avec Doux , manifestation dans les rues de Morlaix, motion du Comité d’entreprise… l'énergie médiatique déployée par l’entreprise Tilly Sabco a-t-elle fini par payer et faire prendre conscience de la gravité de la situation de la filière volaille export en France ? La mise à zéro des restitutions à l’export des poulets allait entraîner automatiquement, pour Tilly Sabco, la décision de suspendre la production à partir de janvier prochain. Cette mesure touchant directement, au moins, un demi-millier d’emplois dans le Finistère ( 300 salariés et 200 éleveurs). Sans parler des conséquences en cascade sur l’amont de la filière. Illustrées par les difficultés rencontrées par Nutrea, fournisseur de poussins et d’aliments aux éleveurs du groupement Univol.
L’entreprise Tilly Sabco n’a pas relâché sa pression. Etant donné les menaces qui pèsent sur la filière avicole ; et du fait qu’aucune autre solution ne soit parue imaginable que celle de s’accrocher au débouché export. La dernière action est la motion, déposée le 21 novembre, par le Comité d'entreprise de Tilly Sabco. Celle- ci résume la situation économique du marché : à savoir que le prix du vif (poulet sortie élevage) brésilien étant en septembre de 1740 $ / tonne ( données France AgriMer) et la parité actuelle euro/ dollar de 1,35, il manque 400 € / tonne pour assurer l’équilibre financier des élevages.
La motion exigeait en conséquence une réponse politique du gouvernement. Ce qui s’est produit le 22 novembre avec la rencontre à Bruxelles, entre le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll et le Commissaire européen Dacian Ciolos. L’enjeu de la réunion était d’obtenir (selon le communiqué du Ministère) l’appui de la Commission pour la mise en place de dispositifs relevant de sa compétence. Le Commissaire européen a ainsi accepté de soutenir, dès 2014, un programme de promotion des deux opérateurs français à l’export. Deuxièmement, la mise en place dès le 1er trimestre 2014 du fonds de stabilisation du revenu des aviculteurs impliqués dans cette filière. Il sera alimenté par des fonds régionaux du Feader et des cofinancements privés. Enfin dernière mesure : une enveloppe exceptionnelle d’aides de la PAC, s’élevant à 15 M€ ; elle pourra être débloquée pour les éleveurs l’an prochain, dans le but « de soutenir l’amélioration de la qualité des produits exportés ».
Un volet financier pour Doux
Il s’entend que ces mesures prises à l’échelon européen s’ajoutent aux actions engagées au niveau national : aides d’urgence pour les fournisseurs de la filière (4 M€ ), subventions (7,5 M€ ) dédiées aux investissements dans les abattoirs de volailles, et enfin utilisation des crédits du Feader, notamment pour les investissements dans les bâtiments d’élevage.
L’autre volet du dossier est purement financier. C’est le changement de tour de table pour le groupe Doux, qui présente aujourd’hui son plan de continuation devant le Tribunal de Commerce de Quimper (29). Hier, à la veille de cette audience reconnue comme capitale, le groupe a annoncé l’accord de reprise signé, d’une part avec son principal client au Moyen-Orient, le groupe saoudien Al- Munajem, et d’autre part avec l’homme d’affaires Didier Calmels. Il est prévu que ce dernier devienne l’actionnaire majoritaire du groupe avec 52,5 % du capital, tandis que Al –Munajem détiendra 25 %, la famille Doux ne gardant que 22,5 % du capital.
Et, dernière nouvelle, cette révision de la structure financière va toucher également Tilly Sabco. Afin de renflouer les comptes de l’entreprise de Guerlesquin, après les difficultés liées à la baisse d’activité du second semestre, son p-dg Daniel Sauvaget vient d’annoncer l'obligation d’ouvrir le capital de son entreprise à d’autres partenaires financiers. Encore un autre défi pour sauver définitivement l’avenir de la filière volaille export.