Les pièces de viande bovine les plus nobles trouvent moins de débouchés pendant le confinement tandis que les ventes de steaks hachés ont augmenté de 35 à 55% en grande surface. En conséquence, la part du steak haché dans la valorisation d’une carcasse s’accélère, pour atteindre 70%. Cela impacte la rémunération des éleveurs, dont les coûts de production sont supérieurs aux prix de vente. Crédit photo Adobe Louis Renaud

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Covid-19 : Les éleveurs demandent une revalorisation du prix du steak haché

11 mai 2020 - Amelie Dereuder

Les ventes de steaks hachés s’envolent, mais les éleveurs continuent de perdre de l’argent. Cette situation a fait réagir les syndicats agricoles, qui ont demandé des aides au gouvernement. Sans succès. Ils appellent aujourd’hui transformateurs et distributeurs à réduire leurs marges.

Avec le confinement, le steak haché a le vent en poupe : les ventes ont progressé de 35 % en frais et 55 % en surgelé en grande distribution. Toutefois, ce succès ne profite pas aux éleveurs, qui réclament depuis plus d’un mois une revalorisation des prix, en baisse malgré la pandémie. La Fédération Nationale Bovine (FNB) a adressé plusieurs courriers au ministère de l’Agriculture. L’organisation fait valoir que, depuis la fermeture des restaurants, la filière a perdu une partie de ses débouchés. Les pièces les plus nobles trouvant moins de débouchés pendant le confinement, elles sont parfois transformées en viandes hachées pour répondre à la demande de la distribution, qui a multiplié ses ventes sur cette catégorie pendant la crise. Les cotations "entrées abattoirs" proposées aux éleveurs ont baissé, avec des intensités différentes qu’il s’agisse de races à viande ou de vaches laitières réformées. Selon Culture Viande, « le prix des viandes hachées ne doit pas être condamné à baisser par principe mais servir de base revalorisée et évolutive en fonction de l’équilibre carcasse ». Actuellement, la part du steak haché dans la valorisation d’une carcasse s’accélère, pour atteindre la valeur de 70 %.

Les éleveurs demandent un partage de la valeur

Cette moindre rémunération impacte directement l’amont. « Nous éleveurs, sommes amenés à produire plus, pour vendre, toujours, nos animaux à un prix inférieur d’un euro au kilo à notre coût de production », s’alarme la FNB dans une lettre datée du 29 mars. L’organisation insiste sur le fait que quelques acteurs de l’aval ont pu réaliser de très bons profits pendant cette crise. Et demande donc que la valeur soit mieux repartagée. « Les distributeurs, comme les industriels, ont les moyens de faire cet effort, pour la communauté nationale. Alors que depuis 20 ans, le prix de la viande vendue aux consommateurs augmente chaque année de 3 % sans qu’aucune hausse ne soit répercutée aux éleveurs, industriels et distributeurs disposent d’une marge dans laquelle trouver les ressources leur permettant d’assurer la survie de notre production ».

Pour leur part, les transformateurs de viande ont répondu via l’association Culture Viande, en rappelant que la perte de valeur s’explique par la guerre des prix entre grandes enseignes et la concurrence industrielle. « Aujourd’hui, en pleine tourmente de la pandémie Covid-19 et avec la perspective à court terme d’une véritable tragédie économique, il est du devoir de tous les acteurs de la filière bovine de trouver rapidement un juste équilibre sur la matière première magique viande », confirme Jean-Paul Bigard, président de Culture Viande.

De son côté, le groupement Les Mousquetaires a décidé de revaloriser le prix de la viande bovine de race à viande. La SVA Jean Rozé va augmenter progressivement ses prix d'achat pour atteindre un minimum de 4 €/kg payé à l’éleveur au 1 juillet 2020, dès lors que les produits sont destinés aux rayons boucherie des enseignes Intermarché et Netto.  Ce dispositif permettra une augmentation de 0,40€/kg par rapport aux cours du marché des races à viande.

Pas d'aides de l’État

Pour aider économiquement l’amont, l’organisation des éleveurs de races à viande du Grand Massif Central a demandé aux Pouvoirs publics d’instaurer un prix minimum payé aux éleveurs. Mesure qui n’a pas été validée par le ministère, qui estime que cela pourrait se révéler contre-productif en favorisant la viande importée au détriment de la production nationale. Le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, Didier Guillaume, croit davantage aux efforts de chaque maillon pour une meilleure répartition de la valeur. Aucune aide de l’État n’est donc à prévoir dans ce domaine. Didier Guillaume encourage plutôt la filière à faire évoluer son modèle. « Il est faux de laisser croire que l’intervention publique, quelle que soit sa forme, puisse pallier une organisation économique structurellement déséquilibrée », estime le ministre. Aux acteurs donc de se mettre d’accord, sachant que la crise du Covid-19 pèse sur tous les maillons et que chacun tente de protéger sa rentabilité dans cette période difficile.

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