Brasseurs de France : « Il faut absolument renégocier la hausse de la taxe »

2 octobre 2012 - Anne-Katell Mousset

Gérard Laloi (au fond) en compagnie de Jean-René Buisson, président de l’Ania et François Hollande – alors candidat à la présidentielle- sur le stand des brasseurs de France lors du dernier Salon international de l’agriculture.

Le gouvernement vient d’annoncer dans le cadre de son projet de budget de financement de la Sécurité sociale pour 2013 le relèvement du niveau de fiscalité sur les bières, qui rapportera 480 millions d'euros. Au siège des brasseurs de France, c'est la stupéfaction et l'incompréhension qui règne. Gérard Laloi, Président de l'association a répondu à nos questions.

  • Process Alimentaire : Comment avez-vous appris cette augmentation du droit d’accise ?

Gérard Laloi : Dans la presse comme tout le monde, il y a une quinzaine de jours. Jusqu’à hier nous n’avions aucun chiffre officiel. J’espère maintenant que nous arriverons à faire reculer le gouvernement. Car en l’état, l’augmentation des droits d’accises est impossible. En 45 ans dans l’agroalimentaire, je n’ai jamais vu une hausse des prix de vente d’un produit de 20% et pourtant c’est ce qui risque de se passer. Du jour au lendemain, le format leader à savoir le pack de 26 cannettes de 25cl va passer d’environ 10 euros à 12 euros ! Ce n’est pas possible !

  • Quel impact selon vous sur la consommation et pour les brasseurs ?

Ce qui me frappe c’est que cette taxe va à l’encontre du « triangle magique » voulu par le gouvernement à savoir : préserver le pouvoir d’achat des classes populaires, préserver l’emploi et développer les PME. Ici on augmente fortement une boisson consommée avant tout par les classes populaires et on ampute donc leur pouvoir d’achat. De plus, pour ce qui est de protéger l’emploi, il faut savoir que le secteur brassicole français est en surcapacité. Les entreprises que ce soient des grandes brasseries, des brasseries familiales indépendantes ou encore les nombreuses microbrasseries, ont au total une capacité de production de plus de 20 millions d’hectolitres par an. A l’heure actuelle le pays produit 16 millions d’hectolitres dont 14 millions sont consommés sur le territoire.

Depuis de nombreuses années, les brasseurs adaptent leur offre à un contexte de baisse de la consommation (-30% en 30 ans) en optimisant les gammes, en créant des bières « premium » ou en jouant la carte du développement régional. Mais cette hausse de 20% va forcément avoir des répercussions sur la consommation et donc sur la capacité de ses brasseries à investir ou a se développer. Je crains que les microbrasseries soient les plus touchées. Elles se sont fortement développées ces dernières années, et elles ont besoin d’investissement. J’ai peur que leur progression – souvent à 2 chiffres – soit freinée. Et quand une microbrasserie de 3 ou 4 salariés ferme ça ne fait pas de bruit, nous ne le verrons même pas…

  • L’argument de la santé est-il recevable selon vous ?

L’histoire nous le montre, et les autres pays aussi, augmenter le prix de la bière pour préserver la santé : cela ne marche pas ! C’est un sujet auquel nous sommes sensible. Nous travaillons notamment sur des campagnes de prévention mais, l’augmentation des prix n’est pas la solution au problème.

  • L’effort de 480 millions demandé est-il si important que ça ?

Oui ! Nous participons actuellement à hauteur de 337 millions. Le gouvernement veut augmenter cet effort de 480 millions d’euros. Quel secteur au chiffre d’affaires de 2 milliards d’euros peut supporter une taxe de plus de 810 millions d’euros ? Nous sommes d’accord de participer, mais pas à ce niveau. A l’évidence il n’y a pas eu de réelle mesure de l’impact économique d’une telle décision. Il faut adapter le niveau de l’aide que nous devons fournir pour ne pas affecter de façon brutale notre secteur.

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